MILLAU-VID La 2CV, c’est comme la vespa, c’est un art de vivre. C’est la simplicité, ce sont des formes uniques, une silhouette indéfinissable avec ce bombé, ces galbes, ces courbes, sans oublier les détails, les phares, les sièges, les roues, le coffre, le rétroviseur, les freins. C’est aussi un bruit, reconnaissable, identifiable même place de la Concorde. Certains disent «ce sont des oeuvres d’art». Je l’ai entendu arriver de loin, ce cliquetis précis, pas vraiment perché, un poil dans les aigus, assez incisif pour identifier cette deuche allant bon train au pied des remparts. Place de la Mairie, dans un virage à droite, elle s’est inclinée légèrement, pas de changement de vitesse, tout en seconde, bruit renforcé, légèrement perché. Le bolide juste garé devant moi, je demande à la conductrice, une baguette sous le bras, vite achetée au boulanger des remparts «elle va bon train votre voiture ?». Il est 8 heures, La Cavalerie se réveille en douceur. Pas un képi blanc dans les rues, la Légion somnole. Pas un souffle de vent, le drapeau gît en berne, enroulé sur son mât comme un serpent, tête en bas. Devant l’entrée du régiment, le planton de faction est emmuré et figé sur ses deux jambes comme une âme en peine. A quoi pense-t-il ? A sa patrie lointaine ? A son amoureuse lointaine, belle comme un Hawaïenne ? Non loin, seuls quatre troufions tripatouillent dans un buisson, l’un deux, d’un fort accent russe me lance «ben oui, […]