Aveyron

17 février 2020

« Non, ici on consomme sur place »

  Bon ! Le take away à Aubrac, plus exactement chez Germaine, cette vénérable institution de la gastronomie locale, ça n’existe pas. Faut-il s’en offusquer ? Sûrement pas. Mais la tarte aux fruits rouges de chez Germaine qui frétille de son épaisse gélatine sous mes narines.… !!! Je la sentais déjà couler lentement, doucement, à savourer ce grand câlin d’un rouge carmin, avec ce pic de sucre à vous rendre diabétique. Je me léchais déjà les gencives noircies par la myrtille sanguine, à croquer ces pépins taquins et leur petit goût acidulé lorsque la pulpe craque sous la dent. Remballé mon gars. Ici, c’est pas Starbucks. Pourtant, ce n’est pas faute de connaître le vieux monsieur qui devant moi, essuie ses verres au torchon à carreaux, immuable derrière son bar depuis…. ? Combien de décades ?? Allez savoir, sur l’Aubrac, la retraite, c’est parfois une notion très abstraite, comme une ligne d’horizon floue qui se dérobe et se recompose au loin à chacun de vos pas vers le grand Nord. Celui-ci de me répondre, la tête penchée «non, ici on consomme sur place».   Sur l’Aubrac, il y a toujours une bonne raison de desserrer la ceinture, la serviette coincée dans le col de chemise, le couteau Laguiole en bois de frêne estampillé Calmels dans la main droite et main gauche la fourchette qui s’impatiente pour jouer les amuse gueules. On est toujours prêt à pousser la chansonnette.  Sur l’Aubrac, la gourmandise, c’est une emprise en toute franchise, de la cassolette de cèpes à la […]
27 janvier 2020

Juste une pincée, salée, sucrée

  Voix divine, effilée, aiguisée au fusil diamant, la voix de Christophe, c’est un aimant transperçant. Sifflement strident d’une flèche perdue. Bruissement larmoyant d’une pluie de verre concassé. Elle vous crucifie sans aucune pitié. C’est un vol de flamands roses, en rafale, en cabale. Elle vous aspire, elle vous brasse dans une spirale de mille octaves. C’est un flirt avec le vide, sous vos pieds, un voile opaque de paraffine, c’est si fragile. Route de Peyre, j’écoute Christophe en duo avec Arno «Dans ma veste…De soie rose…Je déambule morose…Le crépuscule est grandiose…». Je suis d’une humeur gaie, la mélodie glisse dans mes tympans, grinçante. Danger, c’est du verre pilé, je suis en prise, je glisse allègrement. Docilement, je fais allégeance à la beauté des mots. Arno chante rugueux, fiévreux, d’une lente mélancolie infinie, syllabes martelées, voix rauque ruinée par mille fagots de vieux mégots «Peut être un bon jour…Voudras tu…Retrouver…Avec moi…Les paradis perdus». Comprégnac, je rentre dans la salle des fêtes. Je croise Christophe habillé d’un rose soyeux, jambes nues, poilues, torse nu, poilu. Ce n’est pas le Christophe «dans sa veste de soie rose», le dandy électro pop miné par la mélancolie, longues et maigres phalanges ricochant sur le clavier. Devant moi, inattendu, c’est le Christophe de nos champs et campagnes, le Christophe de nos villages, de nos rivages, dans cette vallée du Tarn qui redoute l’étiage.  Ce n’est pas le Christophe «qui déambule morose», lunettes fumées, regard embué, «le regard qui désarme». Christophe, devant moi, torse puissant, n’appuie […]
23 janvier 2020

Ca vaut bien un verre de vin chaud !

  Je me souviens des frères Spanghero surtout Walter, Walter le laboureur, le déménageur, «l’homme de fer», immense mégalithe, virtuose au corps de granit. Je me souviens également des frères Camberabero, surtout Guy, le «Lutin de La Voulte», un fin limier, petit poucet aux pieds d’or pour transformer l’ovale en trésor. Mais je l’avoue en dehors de cela, les années empilées sur une aiguille à tricoter, ma culture rugbystique est toujours aussi plate qu’un vieux tube de pommade camphrée vidé sur des muscles ankylosés. Je suis donc parti à Séverac le Château avec pour seuls provisions ces deux noms qui ont toqué à la porte de mon enfance, les jours de Tournoi des Cinq Nations. Je me souviens, juste un volet tiré sur ce passé, lorsqu’une pénalité était sifflée, quelque soit le camp, celui du Coq, du Trèfle ou de la Rose, j’allais me cacher dans la chambre de mes parents. Je fermais les yeux, je me bouchais les oreilles, je comptais jusqu’à 100 et je revenais m’assoire devant le petit écran. Heureux ou malheureux ? Je gardais toujours quelques carrés de chocolat au cas où pour adoucir les échecs, je n’étais pas si malheureux que cela ! Séverac le Château joue au stade de la Cartonnerie bordé d’une traditionnelle rangée de peupliers, le camping municipal en contrebas, quelques pavillons bâtis aux premières loges et le château médiéval, la fierté du village, posé sur son trône, vestige préservé en tour de vigie sur son talus aux angles aigus. J’ai payé […]
23 janvier 2020

Millau 2020, Et si on parlait éco !!!

  8 heures du mat, une rue du Rajol ruisselante et luisante. Des ombres pressées, pardessus détrempés. Halle du Viaduc, c’est l’heure du café, c’est l’heure de l’éco. Un maire sortant et quatre challengers devant un parterre de chef(e)s d’entreprise…Et si on parlait éco ? Rapido, 15 minutes chacun, chacune, top chrono ! Millau et son économie, sans jambe de bois, sans langue de bois ? Millau ses forces et ses faiblesses, Millau son passé, son présent, mais surtout quel avenir ? Cinq prétendants à la mairie, cinq visions, le grand écart entre anticapitalisme et capitalisme raisonné. Pour une amorce de débat, sans anicroche, un peu de cinoche, sans croque en jambes mais quelques ronds de jambes. Pour que l’économie, celle du porte monnaie et du livret A,, de l’investissement public et privé, du savoir faire local, celle qui respecte l’humain autant que notre patrimoine, s’invite dans le débat municipal. L’économie anti-fatalisme, anti-pessimisme. L’économie solidaire et innovante qui donne du sens à un pays, une ville, n’est ce pas une nécessité !     Photographies réalisées le 21 janvier 2020 à Millau (Aveyron) dans le cadre de la campagne pour les Elections Municipales 2020. Rencontre mise sur pied par le Club des Entrepreneurs, entre les 5 prétendants à la Mairie présentant leur programme économique face aux entrepreneurs millavois (Camille Valabregue, Jérôme Rouve, Philippe Ramondenc, Emmanuelle Gazel, Christophe Saint Pierre, maire sortant).
13 janvier 2020

Jour de cross au pays des Cornards

  En contrebas de Candas, le Tarn fait son caprice. Comme s’il cherchait à rentrer dans le chas d’une aiguille s’enroulant sur ce coteau, à faire mumuse avec la nature, aspirant au passage les eaux de la Muze. Puis il accélère, joli train de vagues, attention au drossage puis arrive aussitôt l’ancienne passerelle bouléguée, brassée au fond des eaux un jour de crue mordante et décapante.  Dernière écume, derniers caprices, derniers spasmes, au sortir de ces blocs de ciment concassés, le Tarn prend enfin le temps de la lenteur. Les eaux se lissent, le temps de savourer, le temps de la glisse, les Raspes sont proches.  La rivière perd de sa malice, une respiration, un sillage, des odeurs, celle des peupliers et de la reine des prés.   Sur la droite, on distingue entre deux cyprès un petit cabanon carré.  Le toit est en tuiles roses vermoulues  surmonté d’une faîtière émaillée, de celles qui sortaient autrefois des fours de Raujolle. Lorsque je navigue sur le Tarn, j’ai toujours une pensée pour Jo Vors, il était propriétaire de cette petite masure aux allures de maison de poupée. Son petit Trianon, son petit nous deux, sa petite évasion. Jo Vors, fut l’un des tous premiers organisateurs à chausser les grandes semelles de la course chapitrée populaire selon la devise »on court, on boit, on mange».  Avec sa grosse bouille et bajoues à la Michel Simon, avec sa carrure de charcutier aux avant bras musclés et sa gouaille de président du Tribunal des […]