Aveyron

20 mars 2025

Mathieu et Margot, de la piste aux sillons du maraîchage !

Jour à peine naissant, vallée du Tarn en enfilade, route déserte, vitres ouvertes, goudron grisonnant fraîchement gravillonné crépitant sous mes roues. Radio muette pour ne pas gâcher le plaisir de dévaler cette vallée avec au loin, à hauteur du pare soleil, entre deux nappes de brumes sombres, une pointe de jour perçant. Peyre, Candas, le pont de St-Rome enjambant le Tarn, se laisser ainsi glisser en toute simplicité, la rivière si proche, d’un vert puissant, vert marécage, léchant ces bordures de roseaux élégants, tiges graciles, équilibre fragile. La rivière à mes côtés, sans me lâcher, aux reflets argentés, je me suis souvenu «tu tournes à droite, tu verras un poteau bleu et tu descends». Carrefour du Mas de la Nauque, aux portes des Raspes, la route du Viala était devant moi, j’ai grimpé. Pas bien longtemps, car au poteau bleu et blanc, je suis descendu sur ma gauche. Piste sombre s’échappant sous d’immenses pins rectilignes et longilignes. Assez vite, un grand virage prononcé, en contre bas, un petit pont enjambant un filet d’eau et les premières serres sont apparues dans ce creux de vallon. Quelques voitures garées aussi, des arbres fruitiers, une maisonnette perchée sur la droite, dans l’allée, des jeux d’enfants, des ballons dégonflés, des vélos, un chien surnommé Pouncho, j’étais bien arrivé chez Mathieu et Margot. Lui, c’est un grand costaud, un gaillard cachant sous son tee-shirt aux couleurs brûlées par le soleil de beaux restes de décathlonien et d’entraîneur d’athlé qu’il fut. Margot à ses côtés, un […]
20 mars 2025

Magie Noire et mains vertes !

Petit rayon de soleil bienfaiteur, vallée du Tarn avalée d’un trait, plus attentif, j’étais, par l’hommage rendu à Robert Badinter sur les ondes que sur les courbes de la route. Profondément ému, les deux mains fixées sur le volant, le regard perdu dans le lointain…9 février 2024 jour de son décès, 9 février 1943 jour de la rafle de son père devant son domicile lyonnais de la rue Sainte-Catherine par la Gestapo antisémite. Faut-il croire au destin ? J’avais rendez-vous dans ce petit vallon secret protégé de la vue par une haute haie de sapins élégants et puissants bordant la route. A ses pieds, le ruisseau coulait une eau limpide pour se jeter plus loin dans le Tarn. Havre de paix seulement troublé par le chien jappant pour annoncer mon arrivée. J’ai rejoint Margot et Chloé dans la dernière serre à droite de cette dépression. La porte était entrouverte, le chien joueur et renifleur dans mes pattes. A l’intérieur, belle et douce chaleur humide, Margot et Chloé les deux mains déjà maculées dans une terre d’un noir volcanique, côte à côte à planter minutieusement de l’or vert. Minuscules petites graines blanches pour certaines, argentées pour d’autres, petits diamants comme pousse dans les ténèbres de la terre. C’était magie noire et mains vertes. Photographies réalisées dans le cadre d’un reportage 4 saisons réalisé chez Margot et Mathieu, maraîchers au Viala du Tarn aux portes des Raspes photographies le 9 février 2024.
20 mars 2025

Le grand bal des dames maraîchères

Bien avant l’envol des colombes, les lancées de dragées, les couronnes de roses blanches, le balancement des jonquilles, les costards ajustés et pantalons aux ourlets ajustés…était venu le temps du Grand Bal des Dames Maraichères dans cette allée en bordure d’un ruisseau roucoulant des eaux limpides. De la remise couverte d’un lierre rampant, repère des gros chats ventrus se gavant de souris, tel était ce curieux cérémonial d’une fin d’hiver déjà en bras de chemise jouant les bonnes mines…. Sortir les voiles… Les dérouler… Les déplier… Les étirer… Puis les replier en les roulant avec, curieusement devant soi, cette longue traine de mariée sans enfants de cœur. Juste le cœur à l’ouvrage pour s’atteler ainsi à la tâche. Surprenant ballet contemporain à marcher ainsi sur ce fin drap blanc pour relier les bords avec le sérieux et la précision d’un skipper avec la grand voile et le spi de son trimaran. Chorégraphie éphémère, élémentaire et…maraichère !!! Photographies réalisées le 15 février 2024 dans la ferme maraichère de Margot et Mathieu nichée aux abords de la vallée des Raspes.
18 mars 2020

Le Brézou, le jour d’avant…

  Les fêlés du frisson post apocalypse repasseront   Au p’tit matin, à quelques heures de l’annonce élyséenne  et solennelle du confinement des français, j’ai pensé en ces temps chavirés «c’est quoi un village abandonné, livré aux âmes errantes, aux herbes rampantes ?». Au beau milieu de mon écran, j’ai donc tapé dans ce rectangle blanc étroit et droit comme une pince à linge «village abandonné Aveyron». Qu’allais-je épingler ? De cette recherche en ligne, un nom mord à l’hameçon, Le Brézou accompagné du titre «village abandonné aux phénomènes très étranges». La source ne m’inspire guère, il s’agit du site complotiste Wikistrike, un blog conspirationniste bien connu, pignon sur rue, dont l’épicerie en gros de la fake news ne craint pas la pénurie. Pas besoin de gratter le vernis, ovni, disparitions inexpliquées, cancers et suicides, ça fricote avec le paranormal, le texte sent le poil frais du Bigfoot, ça lèche les bottes de l’infox, je descends d’un bloc. Le doigt sur le dos de ma souris, je clique sur le titre suivant « Le Brézou, village construit par l’EDF abandonné dans les années 80 ».  Source Wikipédia, à l’appui, un texte et des photos réalisées lors d’une visite intime et documenté d’un promeneur intrigué. Cette fois, cela me semble plus sérieux. Le Brézou, village abandonné ? A en croire ce visiteur anonyme, pas si sûr ? Un délire, une imposture ? A vérifier, ce fut vite décidé. Curieux, au lendemain d’un vote sans second tour, au petit jour, j’ai donc pris la route de Brommat, carte dépliée sur […]
2 mars 2020

« Tiens, ça fait silence tout d’un coup »

  Un silence, Isabelle Huppert retient son souffle. Elle est droite et digne. Elle ouvre les lèvres, elle pose sa voix Les mots sortent avec lenteur, intonation grave, chaque syllabe découpée au carré comme cloutée sur une lame de parquet. Le poème choisi « Le vieil homme » de Louis Aragon. Elle débute ainsi : « Moi qui n’ai jamais pu me faire à mon visage, Que m’importe traîner dans la clarté des cieux, Les coutures, les traits et les tâches de l’âge » Au sommet du chemin de la Roussilhe, entre ciel et terre, une imposante bâtisse blanche regarde la Truyère assagie se faire avaler par les flots intrépides du Lot. En balcon au dessus de cette confluence, la maison de retraite est là, perchée sur ce flanc, baignée d’un soleil capricieux pris en otage entre deux giboulées de mars. Nous sommes le 1er du mois, le baromètre n’attend pas pour déclencher les hostilités. Les majorettes sont rentrées les premières, alignées comme des petits soldats de plomb dans cette salle de vie. Visages et paupières pailletés, quelques pas cadencés, un pas de côté, une courbette, intimidées, elles s’esquivent. Je me faufile, je m’assoie sur l’un des sièges vides. Un rayon de soleil illumine précipitamment la pièce, dehors le ronflement des tagazous s’est tu, les mots du «vieil homme» me reviennent en écho, la voix d’Isabelle Huppert, si profonde, si théâtrale,  est en moi, si prenante en ce jour de carnaval : «Voici déjà beau temps que je n’ai plus coutume, De défier la neige et […]