Deux – trois heures du mat, l’heure des rêves éveillés et des draps mouillés. Le téléphone du PC Course ne sonne plus. Dans son chalet grand comme une maison de poupée, le doigt sur les platines, Cyril n’a toujours pas piqué du nez, sa sono en sourdine pour une ligne d’arrivée déplumée comme le cou d’un poulet bagarreur. Au centre de ce cercle des émerveillements et de la délivrance, Chauchau et son micro au cœur des confidences.
Fin d’une Endurance Trail sauvée d’un Tarn déchaîné, recrachant dans ce tunnel de lumière ces corps meurtris, c’est l’instant majeur, c’est l’instant ravageur, c’est l’instant détonateur. Flot libéré, irradiant et chavirant. C’est précieux, c’est fiévreux, c’est glorieux. C’est intime, c’est sublime, ça illumine.
Ainsi, étais-je bombardé devant cette ligne de tir amis, devant ces saltimbanques de l’endurance jouant l’épilogue d’une bataille solitaire avec eux-mêmes. Certains cherchant le recueillement…Certaines la douceur des joues salées…Certains cherchant le regard profond de la compréhension…Certaines dans la captation irrésistible de lèvres complices et sucrées.
Pourquoi je cours ainsi, pourquoi je m’inflige cela ? Pourquoi je pousse si loin le curseur dans cette quête de sentiments ultimes ? Pourquoi, moi, j’organise ainsi, pourquoi moi, je m’inflige cela ? Pourquoi moi et mon équipe poussons nous le curseur si loin dans cette quête émotionnelle ? L’éternelle question du pourquoi et son insondable réponse souvent laissée en suspens devant l’irrationnalité de tels instants déraisonnés.
Rendre heureux ? Se sentir heureux ? Être vivants, se sentir vivant ? Par ces échanges avec ces hommes et femmes ainsi délivrés. Moi, nous, enchantés parfois submergés mais libérés de tous nos liens d’une organisation au bord du charivari. C’est puissant.
Photographies prises le 18 octobre 2024 dans le cadre de l’Endurance Trail